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La violence qui gangrène Port-au-Prince depuis plusieurs années a des conséquences dramatiques pour ses habitants, en particulier les femmes et les enfants. Dans un contexte marqué par l’insécurité et la domination des gangs armés, les violences sexuelles se multiplient, plongeant leurs victimes dans une détresse sans précédent.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les équipes de Médecins Sans Frontières (MSF) ont pris en charge 4 463 survivants de violences sexuelles en 2024, contre 3 207 en 2023 et seulement 1 775 en 2022. Cette augmentation reflète l’intensification des violences dans les quartiers contrôlés par des groupes armés. Ces agressions, souvent perpétrées par plusieurs agresseurs, visent fréquemment des personnes déjà vulnérables, notamment les déplacés internes et les enfants.
Dans ce contexte, les structures médicales peinent à répondre à l’ampleur des besoins. Les hôpitaux publics, confrontés à l’insécurité, ont dû fermer leurs portes, tandis que les centres d’hébergement d’urgence pour les victimes restent peu nombreux et insuffisamment équipés.
Le parcours douloureux des survivants
Le récit d’une survivante illustre la violence de ces agressions : « Trois hommes armés sont entrés chez nous et m’ont violée sous la menace. Nous avons dû fuir notre maison, mais les souvenirs de l’attaque me hantent encore. » Pour beaucoup, l’agression marque le début d’un parcours de souffrance physique, psychologique et sociale. Contraintes de quitter leur quartier, les victimes se retrouvent souvent sans abri ou dans des camps de déplacés, où elles restent exposées à d’autres violences.
Une prise en charge limitée
Depuis 2015, MSF offre des soins médicaux et psychologiques aux survivants de violences sexuelles à Port-au-Prince. Les patients reçoivent des traitements préventifs contre le VIH, des contraceptifs d’urgence et un accompagnement psychologique. Toutefois, ces interventions, bien qu’essentielles, ne suffisent pas à répondre à l’ampleur des besoins.
Diana Manilla Arroyo, cheffe de mission de MSF, déplore cette situation : « En dépit de nos efforts, de nombreux survivants restent sans protection et sans recours. Il est urgent de développer des services adaptés et accessibles, notamment des hébergements sécurisés et un soutien socio-économique. »
Un appel à l’action
Pour répondre à cette crise humanitaire, il est impératif de renforcer les services de prise en charge des victimes de violences sexuelles à Port-au-Prince. Cela passe par l’ouverture de nouveaux centres d’hébergement, l’amélioration de l’accès aux soins médicaux et psychologiques, et une protection accrue pour les survivants.
Les violences sexuelles à Port-au-Prince sont le reflet d’une société en crise, où les plus vulnérables paient le prix de l’instabilité. Face à cette tragédie, il est essentiel que les autorités locales, les organisations humanitaires et la communauté internationale unissent leurs efforts pour offrir aux victimes une chance de reconstruire leur vie.