Au lieu d’une mission de paix, l’ONU propose un soutien renforcé à la MMS en Haïti

Haïti traverse l’une des crises sécuritaires les plus graves de son histoire. Des groupes criminels organisés contrôlent environ 85 % de la capitale, Port-au-Prince, plongeant la population dans une situation d’extrême précarité. La violence des gangs a entraîné le déplacement de plus de 6 000 personnes en un mois, exacerbant une crise humanitaire déjà préoccupante. Les Nations-Unies préconisent un renforcement de la mission multinationale afin d’atteindre les objectifs fixés.

Face à cette situation d’insécurité galopante, la communauté internationale a autorisé en octobre 2023 le déploiement d’une Mission Multinationale de Soutien à la Sécurité (MSS), principalement composée de forces de police kényanes. Toutefois, cette force, censée compter 2 500 membres, n’enregistre actuellement que 1 000 personnels déployés, limitant son efficacité opérationnelle sur le terrain.

Une proposition de soutien logistique de l’ONU

Dans une lettre adressée au Conseil de sécurité de l’ONU, le Secrétaire général António Guterres a proposé la création d’un bureau d’appui des Nations Unies pour renforcer la MSS. Ce bureau aurait pour mission principale d’apporter un soutien logistique et technique aux forces internationales et à la Police nationale haïtienne (PNH).

L’aide proposée inclut: La fourniture d’équipements non létaux, tels que des drones et des moyens de transport terrestre et aérien.Un approvisionnement en carburant, indispensable aux opérations sur le terrain.Une amélioration de la coordination et du renseignement pour mieux cibler les opérations contre les gangs.

M. Guterres souligne que les véhicules blindés actuellement en service sont inadaptés aux environnements urbains de Port-au-Prince et que l’absence de pièces détachées empêche l’entretien d’une grande partie du matériel existant.

Pour financer ce soutien, le Secrétaire général propose que les ressources logistiques et matérielles soient couvertes par le budget de maintien de la paix de l’ONU, tandis que les salaires des forces déployées continueraient d’être pris en charge par des contributions volontaires des États membres.

Cependant, cette approche soulève des questions parmi les membres du Conseil de sécurité, notamment quant à la pérennité du financement et aux responsabilités de l’ONU dans cette mission.

Une transition vers une mission de maintien de Paix ?

Un débat agite actuellement la communauté internationale : faut-il transformer la MSS en opération de maintien de la paix de l’ONU ? Cette évolution garantirait un financement stable et permettrait un renforcement des capacités d’intervention.

Les États-Unis plaident en faveur de cette transition, estimant que seule une mission onusienne pleinement mandatée pourra rétablir l’ordre en Haïti. En revanche, António Guterres s’oppose pour l’instant à cette transformation, estimant que le pays n’est pas prêt pour une mission de maintien de la paix classique. Il préconise plutôt un renforcement progressif de la MSS, avec un appui logistique accru.

Si certains pays soutiennent l’idée d’une intervention plus robuste de l’ONU, d’autres restent réticents. La Russie et la Chine, notamment, estiment qu’il est trop tôt pour envisager une mission de maintien de la paix et que la MSS doit d’abord prouver son efficacité.

Dans ce contexte, M. Guterres propose un modèle similaire à celui mis en place en Somalie, où une force autorisée par l’ONU est dirigée par l’Union africaine. Une telle approche permettrait d’intensifier la lutte contre les gangs tout en évitant les lourdeurs administratives d’une mission onusienne traditionnelle.

Plus de huit mois après l’arrivée du premier contingent kényan, la MSS ne compte toujours qu’environ 1 000 soldats, soit bien en dessous des effectifs prévus. En plus de cette faiblesse numérique, la mission souffre de contraintes matérielles majeures, freinant son efficacité sur le terrain.

Alors que l’insécurité continue de s’aggraver et que la population haïtienne endure une crise humanitaire grandissante, la communauté internationale est confrontée à un dilemme urgent : comment renforcer efficacement la sécurité en Haïti sans reproduire les erreurs des précédentes interventions onusiennes ?