
Dans un contexte de crise sécuritaire et politique persistante, le gouvernement haïtien, dirigé par le Premier ministre Alix-Dider Fils-Aimé, a signé un contrat d’un an avec la firme américaine Continental Strategy pour défendre les intérêts d’Haïti aux États-Unis. Selon un article du Miami Herald, cette collaboration, officialisée le 7 février et enregistrée au Département de la Justice américaine le 24 février, coûte 35 000 dollars par mois au Trésor public haïtien.
Dirigée par Carlos Trujillo, ancien ambassadeur des États-Unis auprès de l’Organisation des États Américains (OEA) sous Donald Trump, Continental Strategy a pour mission d’améliorer l’image d’Haïti à Washington, d’attirer des investissements et d’appuyer la réforme du secteur financier haïtien.
Si d’autres pays de la région, comme le Guyana, ont également fait appel à cette firme pour 50 000 dollars par mois, leur démarche s’inscrit dans une volonté affichée de renforcer leurs liens économiques et diplomatiques avec les États-Unis. En revanche, du côté haïtien, aucune communication officielle n’a été faite à ce sujet. Ni le bureau du Premier ministre, ni le Conseil présidentiel de transition (CPT) n’ont expliqué les motivations précises de cet engagement, alimentant ainsi un climat de suspicion.
Cette opacité soulève des inquiétudes parmi les observateurs politiques et la société civile. Pour Sauveur Pierre Étienne, ancien candidat à la présidence, bien que l’engagement d’un lobbyiste puisse être une démarche stratégique, les priorités d’Haïti devraient être ailleurs. Il estime que le gouvernement devrait avant tout œuvrer à la levée de l’embargo sur les armes afin de mieux équiper les forces de l’ordre dans leur lutte contre les gangs.
Le contraste entre cette dépense en lobbying et l’état de crise du pays est frappant. Alors que les gangs armés contrôlent de vastes territoires, que les forces de police manquent de matériel et que plus de 700 000 personnes sont déplacées à cause de la violence, le gouvernement choisit d’investir des millions de gourdes dans une opération de séduction à Washington.
Lobbying ou maintien du pouvoir ?
Selon une source citée par le Miami Herald, Carlos Trujillo travaillerait directement avec Fils-Aimé pour inciter Washington à reprendre le dialogue avec Haïti. L’objectif affiché serait de créer un climat favorable à l’organisation d’élections. Toutefois, certains analystes se demandent si cette initiative vise réellement à sortir le pays de l’impasse ou plutôt à assurer au gouvernement de transition le soutien des États-Unis pour se maintenir en place au-delà des délais fixés par l’accord créant le CPT.
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