
Le ministère haïtien des Affaires étrangères (MAEC) tente de raviver sa machine diplomatique. Ce lundi, il a annoncé l’affectation d’une nouvelle cohorte de 28 jeunes diplomates, dont 12 femmes, formés à l’Académie diplomatique Jean Price Mars. Ils seront intégrés aux services internes du ministère. Une initiative présentée comme un jalon dans la réforme administrative voulue par le chancelier Jean Victor Harvel Jean-Baptiste.
Le MAEC évoque une volonté de modernisation et de gestion de carrière, dans un contexte où l’institution peine pourtant à affirmer la voix d’Haïti à l’international. L’affectation de jeunes recrues dans les services internes peut paraître comme une étape préparatoire, mais elle intervient dans une période où le pays aurait justement besoin de représentants efficaces et visibles sur la scène diplomatique mondiale.
Depuis plusieurs années, Haïti traverse une dégradation continue de son appareil démocratique. Les institutions sont fragilisées, les élections repoussées, et la transition politique actuelle n’a pas rétabli la confiance. Dans ce contexte, la diplomatie haïtienne semble orpheline, incapable de défendre fermement les intérêts du pays, notamment face aux abus subis par ses ressortissants à l’étranger.
L’absence d’une voix forte pour dénoncer les mauvais traitements infligés aux migrants haïtiens en République dominicaine, ou les politiques restrictives aux États-Unis, témoigne de ce vide. Tandis que les crises migratoires s’aggravent, Haïti donne l’impression d’être sans porte-parole sur les grandes scènes internationales.
L’affectation de nouveaux cadres internes est louable, mais elle pose question sur l’efficacité immédiate du dispositif diplomatique. Aucune précision n’a été donnée sur la capacité réelle de ces jeunes à renforcer la présence d’Haïti dans les forums internationaux. Le pays semble plus préoccupé par ses structures internes que par l’urgence de reconstruire son image à l’étranger.
La réforme du MAEC aurait pu s’accompagner d’une relance stratégique de la diplomatie active : désigner des ambassadeurs expérimentés, rétablir des contacts solides avec les pays partenaires, ou défendre publiquement les droits des Haïtiens à l’extérieur. En l’état, cette réforme apparaît surtout comme symbolique.
Alors que le monde continue d’évoluer, Haïti reste figé dans une diplomatie de transition. La jeunesse diplomatique formée aujourd’hui devra, peut-être, porter seule demain la lourde tâche de redonner à la nation une voix que les crises politiques internes lui ont fait perdre.
La Rédaction