51e anniversaire de la FASCH : Quand les murs tombent, la pensée resiste

La Faculté des Sciences Humaines (FASCH) de l’Université d’État d’Haïti souffle aujourd’hui ce 19 juin, ses 51 bougies dans un silence lourd de sens. Un silence imposé, armé, chargé de tristesse et de colère. Depuis mars 2025, le bâtiment qui l’a vue naître, grandir et rayonner, sis à l’avenue Christophe, est devenu un territoire abandonné, vidé de ses étudiants, professeurs, employés, et de sa mission première : transmettre le savoir, former des citoyens, penser le pays.

C’est sous la menace des armes, à la suite d’une attaque brutale menée par la coalition criminelle « Viv Ansanm », que l’administration de la FASCH a dû plier bagage. Ce haut lieu de réflexion, de débats, de résistance intellectuelle, est désormais muet. Les murs qui ont vu passer des générations d’intellectuels haïtiens ne résonnent plus des voix vibrantes des débats en salle, des lectures de cours, des mouvements étudiants, des rêves d’émancipation.

Fondée en 1974, en pleine dictature duvaliériste, la FASCH n’a jamais été une simple faculté universitaire. Elle a toujours été un creuset de pensée critique, une matrice de résistance citoyenne. De la chute de Jean-Claude Duvalier aux grandes mobilisations étudiantes de 2004, de la défense des droits humains aux luttes sociales contemporaines, la FASCH a constamment joué un rôle central dans la vie politique et sociale du pays.

Ses 51 ans ne sont donc pas qu’un chiffre. Ils racontent une histoire collective. Une histoire faite de luttes contre l’oppression, contre l’ignorance, contre la médiocrité, contre l’oubli. Une histoire qui s’écrit aussi à travers les sacrifices d’enseignants dévoués, de chercheurs courageux, d’étudiants engagés, de militants tombés sans justice.

Aujourd’hui, l’Université d’État d’Haïti et la FASCH en particulier symbolisent une flamme fragile, battue par les vents d’un pays à genoux. La violence armée, l’indifférence des autorités, le désengagement de l’État, et la précarité grandissante des conditions d’enseignement et d’étude, tout semble conspirer contre l’avenir de l’éducation publique.

Et pourtant, malgré l’exil forcé, malgré l’incertitude, malgré le désespoir, les voix de la FASCH continuent de porter. Dans des espaces prêtés, en ligne ou ailleurs, des cours s’improvisent, des mémoires s’écrivent, des idées s’échangent. Car si les murs tombent, la pensée, elle, résiste.

Le 51e anniversaire de la FASCH ne donnera lieu à aucune cérémonie grandiose. Il n’y aura pas de discours officiels, ni de coupures de ruban. Ce sera une journée de recueillement, de mémoire, mais aussi de colère. Colère contre un pays qui semble avoir abandonné ses universités, ses enseignants, sa jeunesse.

Mais ce sera aussi, peut-être, un moment pour rallumer la flamme. Pour se rappeler que l’université n’est pas un luxe. C’est un droit. C’est un devoir. C’est une promesse faite à une société qu’on refuse de livrer au néant.