Fin de la mission multinationale en Haïti, un bilan pauvre après plus d’un an d’opérations

La Mission multinationale de soutien à la sécurité (MMSS) a officiellement pris fin le 2 octobre 2025, marquant la clôture de près de quinze mois d’intervention sur le territoire haïtien. Lancée sous le leadership du Kenya, elle visait à appuyer la Police nationale d’Haïti (PNH) face à la montée en puissance des gangs armés qui contrôlaient de larges portions du pays.

Déployée progressivement à partir de juin 2024, la mission a mobilisé plusieurs contingents étrangers, principalement kenyans, soutenus logistiquement et financièrement par les États-Unis et d’autres partenaires internationaux. Toutefois, elle n’a pas réussi à réunir les 2 500 membres promis à Haïti, ni à collecter les 600 millions de dollars nécessaires à son fonctionnement, et a souffert d’un manque d’équipements adaptés à la guérilla urbaine menée par les gangs.

Ses objectifs étaient de sécuriser des zones stratégiques, de faciliter la reprise des services publics et de créer les conditions nécessaires à l’organisation d’élections dans un climat plus stable. Aucun de ces objectifs n’a été pleinement atteint : aucune zone n’a été véritablement récupérée, et pour assurer la continuité de leurs opérations, les contingents ont été contraints de se relocaliser dans des hôtels ou de louer des espaces sécurisés. Près de 90 % de la capitale et plusieurs villes de province restent sous le contrôle des gangs, empêchant tout déplacement nécessaire à la tenue d’élections.

Au cours de l’année écoulée, la mission affirme avoir obtenu certains résultats dans quelques secteurs de la capitale. Mais la détérioration rapide de la situation sur le terrain contredit ces déclarations. La MMSS soutient que des opérations conjointes avec la PNH ont permis d’affaiblir quelques groupes armés, mais ces derniers sont revenus plus puissants, s’en prenant à la population civile, aux policiers et même à des membres de la mission multinationale.

Le bilan reste donc mitigé. Malgré quelques avancées ponctuelles, les gangs ont conservé une forte capacité de nuisance et ont même étendu leur contrôle à d’autres zones en présence de la mission internationale. Celle-ci a perdu trois policiers kenyans, tués par des groupes armés dans le département de l’Artibonite. Le manque d’effectifs, les problèmes de coordination et les attaques ciblées ont considérablement limité la portée de l’opération.

Sur le plan politique, la mission n’a pas réussi à instaurer un climat suffisamment stable pour permettre la tenue d’élections, pourtant annoncées comme un objectif prioritaire. Les réformes institutionnelles prévues ont pris du retard, et la PNH demeure sous-équipée pour maintenir seule la pression sécuritaire à long terme.

Face à l’échec de la mission multinationale, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté, le 30 septembre, une résolution prévoyant la mise en place d’une nouvelle force internationale de « suppression des gangs » pour remplacer la MMSS. Cette force devra compter 5 500 membres et sera appuyée par un bureau de soutien des Nations unies à Port-au-Prince, chargé d’apporter une assistance logistique, en armement et en coordination des opérations anti-gangs.

Avec la fin officielle de la mission, la responsabilité sécuritaire repose désormais entièrement sur les forces haïtiennes, en attendant le déploiement — sans date précise — de la nouvelle force proposée par les États-Unis et le Panama. Les autorités locales et les partenaires internationaux soulignent la nécessité de cette nouvelle initiative, censée concentrer ses efforts sur le démantèlement des gangs et la restauration d’une stabilité durable.

Cependant, certains secteurs restent sceptiques quant à l’efficacité de cette future mission. Ils évoquent les précédents de la MINUSTAH en 2004 et de la récente mission dirigée par le Kenya, qui n’ont pas apporté de solutions durables. Selon eux, la véritable réponse à la crise haïtienne doit venir d’abord des Haïtiens eux-mêmes, qui vivent et comprennent directement la situation.

La Rédaction

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