De qui les gangs en Haïti reçoivent-ils leurs ordres ?

Haïti traverse une période critique marquée par une montée vertigineuse de l’insécurité et une perte apparente de contrôle des institutions étatiques. Cette situation soulève des questions cruciales : qui détient réellement le pouvoir dans le pays, et dans quelle mesure les gangs armés collaborent-ils avec les autorités ? Les récents développements ont mis en lumière des faits troublants qui alimentent le débat sur la connivence entre les forces de l’État et les groupes criminels.

Un complot bien ficelé : les gangs, bras armés d’une stratégie politique

En effet, il devient de plus en plus évident que les politiciens et les gangs armés partagent une mission commune: déstabiliser le pays pour mieux asseoir leur pouvoir et leur domination. Ce qui semblait autrefois être des groupes criminels autonomes apparaît aujourd’hui comme des pions dans un jeu politique complexe et calculé.

Les vrais maîtres des gangs: des acteurs dans l’ombre

Il ne fait désormais plus de doute que les gangs armés ne sont pas des entités isolées. Derrière leurs actions violentes et leurs exactions se cachent des commanditaires: des figures puissantes opérant dans l’ombre, souvent issues des sphères politiques ou économiques. Ces gangs ne servent pas leurs propres intérêts; ils travaillent pour des acteurs bien identifiés qui utilisent le chaos et la peur comme outils de contrôle.

Un approvisionnement stratégique en armes et munitions

Comment ces groupes, opérant dans un pays en crise, parviennent-ils à se ravitailler régulièrement en armes et en munitions ? La réponse est troublante: il s’agit d’un mécanisme bien organisé, soutenu par des complicités locales et internationales. Ces flux d’armement ne sont pas le fruit du hasard. Ils s’inscrivent dans un objectif précis: garantir que les gangs restent une force opérationnelle, capable de semer la terreur et d’affaiblir les institutions.

Impunité et répression sélective

Le paradoxe est glaçant. Les gangs responsables de massacres atroces, ayant causé des centaines de victimes innocentes, semblent jouir d’une impunité totale. Pendant ce temps, ceux qui osent dénoncer certaines pratiques, et mettre à nu des politiciens à l’instar de Barbecue qui expose les liens entre la criminalité et le pouvoir, deviennent les cibles privilégiées des forces de l’ordre. Pourquoi ces deux poids, deux mesures ? Avant c’était Vitelhomme qui avait dévoilé le plan macabre visant à assassiner l’ancien président Jovenel Moïse. Cela démontre donc une volonté de protéger les véritables instigateurs des violences et de réduire au silence toute voix dissidente.

Un dessein politique clairement défini

Les gangs ne sont pas de simples organisations criminelles. Ils sont devenus des acteurs politiques à part entière, instrumentalisés pour des agendas spécifiques. Avant l’émergence de la coalition criminelle Viv Ansanm, deux groupes principaux, le G9 et le GPEP, dominaient la scène. Ces coalitions répondaient aux intérêts de deux courants politiques distincts, montrant que chaque camp avait ses protégés. L’unification des gangs en de une alliance stratégique n’est non plus le fruit du hasard. Elle sert à renforcer leur influence et à peser dans le jeu politique national.

Une reprise de contrôle suspecte : silence des gangs et réouvertures inattendues

En quelques jours seulement, des événements majeurs se sont produits dans des zones auparavant considérées comme des “territoires perdus” : la réouverture de l’hôpital Chancerelles, la levée du siège des locaux de l’Inspection générale de la Police nationale d’Haïti (IGPNH), et la reprise du commissariat de Petite Rivière de l’Artibonite. Fait étonnant: toutes ces actions se sont déroulées sans un coup de feu tiré. Cette soudaine accalmie interroge. Comment les autorités ont-elles réussi à neutraliser si facilement des groupes armés notoirement violents ?

Un contraste avec le passé récent

La réouverture de l’hôpital Chancerelles et l’annonce imminente de la remise en fonction de l’Hôpital Général représentent des avancées symboliques. Toutefois, elles tranchent radicalement avec l’épisode dramatique de la visite de Garry Conille à l’Hôpital Général, qui avait été marquée par des tirs nourris des gangs. Là où les efforts précédents avaient échoué, le nouveau gouvernement semble avoir réussi. Mais à quel prix ?

La reprise du commissariat: victoire ou pacte tacite ?

Le contrôle du commissariat de Petite Rivière de l’Artibonite par la Police nationale d’Haïti (PNH) aurait pu être perçu comme une victoire contre les gangs. Cependant, le manque de résistance de ces derniers, connus pour leur férocité, suscite des soupçons. Cette opération est-elle le signe d’un réel rétablissement de l’autorité de l’État, ou s’agit-il d’un simple réaménagement des rapports de force entre les autorités et les gangs armés ?

Alors que le chef de gang Vitelhomme a récemment dominé les discussions, c’est désormais Barbecue, à la tête du G9, qui monopolise l’attention. Cette alternance met en lumière la fluidité des alliances et des rapports de pouvoir dans le paysage criminel haïtien. L’État semble parfois absent, parfois complice, laissant planer le doute sur qui contrôle vraiment les gangs. Reçoivent-ils des ordres d’acteurs étatiques, ou agissent-ils de manière indépendante tout en collaborant à leurs propres conditions ?

Silence des armes: signe de complicité ?

Le calme relatif observé lors de ces récents événements, notamment l’absence d’affrontements armés, pourrait être interprété comme le fruit de négociations implicites. Cette situation alimente les soupçons selon lesquels certains membres du pouvoir collaboreraient avec des gangs notoires pour atteindre des objectifs stratégiques, au détriment de l’autorité légitime de l’État.

Quelle issue pour Haïti ?

La situation actuelle laisse planer de sérieuses inquiétudes. Les gangs apparaissent comme des acteurs incontournables, capables de saboter ou de soutenir l’action de l’État selon leurs intérêts. Pour briser cette dynamique, il est impératif d’instaurer une volonté politique ferme, de renforcer les institutions et de solliciter un soutien international accru. Cependant, tant que des complicités internes persisteront, Haïti continuera de s’enliser dans une spirale de violence et d’impunité.

Le défi est clair : rétablir la légitimité des institutions légales et faire en sorte que la loi prévale sur la violence et la corruption. Mais cela nécessite une transparence totale et un engagement sans faille pour couper définitivement les liens entre le pouvoir et le crime organisé.

Ces alliances entre gangs et acteurs politiques ne sont pas anodines. Elles visent à affaiblir les institutions, à instaurer un climat de peur, et à maintenir un statu quo favorable à ceux qui tirent les ficelles. Chaque massacre, chaque acte de violence, n’est pas seulement une tragédie humaine, mais un coup porté à l’État de droit et à la souveraineté du pays.

Face à ce complot bien ficelé, la société civile et les institutions internationales doivent unir leurs forces pour briser ce cercle vicieux. La lutte contre ces alliances toxiques passe par une transparence totale, le démantèlement des réseaux d’armement, et une réforme en profondeur des institutions judiciaires et policières. L’heure n’est plus à l’inaction. Il en va de l’avenir du pays et de la sécurité de ses citoyens.

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