Le conseiller-président Louis Gérald Gilles n’a pas répondu, ce lundi 9 décembre 2024, à la convocation du juge d’instruction Benjamin Félismé, chargé de l’enquête sur l’affaire de la Banque Nationale de Crédit (BNC). Cette absence, prévisible, s’inscrit dans une stratégie de défense visant à contester la légitimité de la procédure judiciaire engagée contre lui.
Au cœur de cette affaire, trois conseillers présidentiels, dont Louis Gérald Gilles, sont accusés d’avoir sollicité 100 millions de gourdes auprès de Raoul Pierre Louis, alors président du Conseil d’administration de la BNC, pour lui permettre de conserver son poste. Ces accusations, qui ont éclaboussé l’exécutif, ont mené à l’ouverture d’une enquête judiciaire sous la direction du juge Benjamin Félismé.
Cependant, Louis Gérald Gilles et ses avocats ont choisi de contester la légalité de cette procédure, invoquant des arguments constitutionnels.
Une défense axée sur la Constitution
Les avocats de M. Gilles ont déposé, le 28 octobre dernier, une requête dénonçant ce qu’ils qualifient de violations flagrantes de la Constitution amendée de 1987. Ils affirment que leur client, en sa qualité de Conseiller-Président, bénéficie d’une immunité judiciaire et ne peut être poursuivi que devant la Haute Cour de Justice.
Selon l’article 185 de la Constitution, cette instance est la seule compétente pour juger un haut responsable de l’État. Or, l’absence actuelle de cette juridiction rend toute procédure judiciaire à l’encontre de M. Gilles juridiquement nulle, selon ses avocats.
Ils reprochent également au juge Félismé d’avoir transformé un mandat d’invitation en un mandat de comparution, signe, selon eux, d’un acharnement judiciaire.
Pour justifier le refus de leur client de se présenter, les avocats ont récusé le juge Benjamin Félismé ainsi que tous les juges d’instruction du Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince. Cette récusation repose sur des allégations de “suspicion légitime”, estimant que le juge ne peut instruire cette affaire en toute impartialité.
Un des avocats de M. Gilles, intervenant dans la presse ce lundi, a réitéré que le juge devait se retirer du dossier ou émettre une requête de non-instruction, faute de compétence légale.
Une crise juridique et politique
Cette affaire met en lumière les tensions entre le système judiciaire et l’exécutif dans un contexte politique déjà fragilisé. Le refus de M. Gilles de répondre à la convocation du juge pose des questions sur la capacité du pouvoir judiciaire à gérer les affaires de corruption impliquant de hauts responsables de l’État.
En l’absence d’une Haute Cour de Justice, le dossier semble dans l’impasse, alimentant les spéculations sur une instrumentalisation politique de la justice. Pendant ce temps, l’opinion publique attend des réponses claires sur les allégations de corruption qui ternissent davantage l’image des autorités en place.