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L’éducation est censée être un rempart contre la barbarie, un sanctuaire où les générations futures se forgent un avenir. Pourtant, en Haïti, la violence s’est immiscée jusque dans ces lieux de savoir, transformant les bancs d’école en cibles et les salles de classe en champs de bataille. Le drame survenu le 11 février au Centre d’Études Diplomatiques et Internationales (CEDI), où un étudiant a perdu la vie sous les balles, illustre avec effroi cette réalité insoutenable.
Comment en est-on arrivé là ? Comment une salle de classe peut-elle devenir le théâtre d’un crime odieux, d’une injustice criante ? Ce n’est plus une tragédie isolée, mais un symptôme d’un État en faillite, d’une société où la vie humaine semble avoir perdu toute valeur.
L’insécurité qui gangrène Haïti depuis des années ne cesse de s’intensifier. Les gangs armés dictent leur loi, contrôlent des quartiers entiers et imposent leur violence comme seule autorité. Face à ce chaos, l’État reste passif, impuissant, comme s’il avait abandonné sa mission première : protéger ses citoyens.
Les rues ne sont plus sûres, les transports en commun sont des pièges, les domiciles deviennent des forteresses de fortune. Désormais, même les institutions académiques ne sont plus épargnées. Ce qui devait être un espace d’apprentissage est devenu un lieu de deuil, une preuve supplémentaire que le pays sombre dans une spirale dont il ne semble pas pouvoir s’extraire.
Chaque balle perdue, chaque assassinat, chaque enlèvement est un aveu de faiblesse du pouvoir en place. Les jeunes, déjà privés d’opportunités économiques, sont maintenant privés du simple droit d’étudier sans risquer leur vie. Quel avenir peut encore se dessiner dans un tel climat ?
Les promesses de réformes sécuritaires se succèdent, mais les actes concrets font défaut. Pendant que les dirigeants multiplient les discours creux, les familles enterrent leurs enfants, les écoles ferment leurs portes et l’espoir s’éteint. Le pays se meurt à petit feu. Cette inertie est un crime en soi, une forme de violence institutionnalisée qui tue autant que les armes.
Dans de nombreux pays, l’éducation est considérée comme un levier de développement, un moteur de progrès. En Haïti, elle est devenue un acte de bravoure. S’asseoir sur un banc d’école, ouvrir un livre, suivre un cours sont désormais des actions qui exigent du courage, tant les dangers sont omniprésents. Un pays qui laisse mourir ses étudiants en pleine salle de classe est un pays qui décide de condamner son propre avenir.