
Alors que des quartiers entiers tombent aux mains des gangs, que des familles fuient par milliers la violence armée et que la population suffoque dans une crise humanitaire sans précédent, le gouvernement haïtien a choisi de saluer l’élection du nouveau pape. Dans un communiqué diffusé le 9 mai, le premier ministre Alix Didier Fils-Aimé exprime sa « profonde déférence » à l’égard de Sa Sainteté le pape Léon XIV, fraîchement élu à Rome.
« Haïti, nation profondément enracinée dans la tradition catholique », écrit la Primature, espère que ce pontificat sera placé sous le signe « de la paix, de la fraternité et de la justice pour tous les peuples ». Une déclaration d’intention symbolique, mais qui sonne terriblement creux quand on pense aux cris des habitants de Port-au-Prince, Kenscoff ou Mirebalais, pris en étau entre l’indifférence de l’État et la brutalité des groupes armés.
Les gangs haïtiens ne cessent de gagner du terrain. Ils incendient des commissariats, attaquent les hôpitaux, enlèvent, violent, tuent sans relâche. Pourtant, aucune déclaration ferme du gouvernement, aucune mesure d’urgence sérieuse n’a été prise ces dernières semaines pour stopper cette descente aux enfers. Dans ce silence, les félicitations envoyées à Rome ressemblent à un pied de nez à une nation en souffrance.
Le contraste est glaçant. D’un côté, un pouvoir exécutif obsédé par les formules diplomatiques et les gestes symboliques. De l’autre, un peuple à genoux, abandonné face aux armes des gangs. Ce n’est pas un message de paix envoyé au Vatican qui sauvera les enfants réfugiés sous les tentes, ni les malades sans soins, ni les femmes traquées dans les rues de la capitale.
La foi fait partie de l’âme haïtienne, certes. Mais l’État, lui, a des responsabilités terrestres. Dans une situation aussi grave, la priorité du gouvernement devrait être de libérer son territoire, protéger ses citoyens et reconstruire ses institutions.
La Rédaction
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