
D’une panne à l’autre, voilà le triste résumé du fonctionnement de Digicel en Haïti. Mercredi 11 juin 2025, l’après-midi a été marqué par une coupure massive de ses services : appels inaccessibles, Mon Cash paralysé, internet indisponible. Une scène devenue familière, presque banale, mais jamais anodine. Car chaque défaillance creuse un peu plus le gouffre de la méfiance entre la population et une entreprise qui, jadis, incarnait l’innovation.
Ce n’est plus un simple problème technique. C’est une répétition chronique de coupures, vécue comme une agression silencieuse contre des clients captifs, privés d’alternative. Pire encore, ces interruptions de service surviennent alors que les tarifs grimpent, les forfaits rétrécissent et l’expérience utilisateur s’effondre. Une spirale qui pousse beaucoup à se demander si Digicel sert encore la population ou si elle l’exploite.
De plus en plus de consommateurs comparent son fonctionnement à celui d’un gang. Pourquoi ? Parce qu’on paie sous contrainte, on subit les coupures, on n’obtient aucune réponse claire, et l’opérateur reste impuni. L’extorsion ne brandit pas toujours une arme : parfois, elle s’emballe dans une facture mensuelle et un service défaillant.
Le PDG, Jean Philippe Brun, reste silencieux. Tandis que les clients hurlent leur frustration sur les réseaux sociaux, aucune déclaration officielle, aucun geste concret. Comme si la voix de millions d’usagers ne pesait rien. Ce silence entretient l’image d’un pouvoir opaque, perché loin des réalités quotidiennes.
Dans les campagnes comme dans les villes, les pannes ont des conséquences tangibles : transactions Mon Cash impossibles, microentreprises paralysées, perte d’accès à l’information, voire aux urgences. En 2025, la téléphonie et l’internet ne sont plus des luxes — ce sont des droits vitaux. Et Digicel échoue à les garantir.
L’opacité règne. Aucun calendrier de rétablissement, aucun rapport transparent sur l’origine des pannes. Les clients sont maintenus dans l’ignorance, contraints d’attendre, de payer, de subir. Comme face à une autorité illégitime, toute plainte semble inutile, car aucun organe de contrôle indépendant ne vient poser de limites.
Plus inquiétant encore : l’État brille par son absence. Ni ministère ni instance régulatrice ne demande des comptes à Digicel. Ce vide institutionnel abandonne la population à une entreprise qui semble jouir d’une impunité totale. Sans contrepoids, Digicel agit comme une force prédatrice.
La question est simple et brutale est : à quoi sert Digicel en Haïti aujourd’hui ? Fournir un service ou récolter des profits sur le dos d’un peuple déjà épuisé ? Si l’entreprise veut conserver une place légitime dans l’espace public, elle devra rompre avec l’arrogance du silence, reconnaître ses échecs et rebâtir un lien de respect avec ses abonnés. Sinon, elle demeurera, pour beaucoup, l’équivalent technologique d’un gang organisé.
La Rédaction