
Cela fait un an que Normil Rameau a été reconduit à la tête de la Police Nationale d’Haïti (PNH), dans un contexte de crise sécuritaire sans précédent. Le 21 juin 2024, il promettait, dans un discours solennel, de restaurer l’autorité de l’État, de démanteler les gangs armés et de ramener la paix dans les quartiers. Douze mois plus tard, la situation a empiré de manière dramatique. Pour l’Ordre des Défenseurs des Droits Humains (ORDEDH), le bilan de ce mandat est non seulement catastrophique, mais représente un danger pour l’avenir du pays.
L’échec de Normil Rameau ne se limite pas au front sécuritaire traditionnel. Il s’est également illustré tragiquement dans le dossier de la réouverture de l’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti (HUEH), prévue pour le 24 décembre 2024. Malgré les correspondances officielles du Dr Dukenson Lorthe Bléma adressées à la direction de la PNH, au ministère de la Défense, à celui de la Justice et aux autorités sanitaires pour assurer la sécurité du périmètre, aucune disposition concrète n’avait été prise. Cette inaction a ouvert la voie à une attaque violente, en plein jour, ayant coûté la vie à plusieurs personnes, dont des journalistes et des agents de sécurité. Ce drame sanglant, survenu alors que le pays espérait rouvrir son plus grand hôpital public, est venu illustrer de manière brutale la faillite du leadership de Normil Rameau, incapable d’anticiper ou de répondre aux exigences sécuritaires d’un événement aussi symbolique et stratégique.
« Il s’agit de redonner le plus précieux espoir à toute une population : celui de recommencer à vivre en toute tranquillité », avait déclaré Normil Rameau, promettant que « la force de la loi réduira en silence l’arrogance et la terreur des criminels ». Un an plus tard, cette promesse sonne creux, et la réalité sur le terrain est tout autre.
Selon l’ORDEDH, la PNH sous la direction de M. Rameau n’a enregistré aucun gain significatif. Pire encore, des zones autrefois sécurisées sont aujourd’hui livrées à l’anarchie. Dans une note rendue publique ce 21 juin, l’organisation dresse un constat accablant : plus d’un million d’Haïtiens sont devenus des déplacés internes, fuyant la violence des gangs qui contrôlent désormais des pans entiers du territoire.
« C’est une tragédie humaine sans précédent. Ce n’est pas seulement un échec sécuritaire, c’est un effondrement du devoir de protection de l’État envers ses citoyens », écrit l’ORDEDH. Malgré l’acquisition de nouveaux équipements et la coopération internationale en matière de sécurité, aucune stratégie efficace n’a été mise en œuvre.
L’organisme ne s’arrête pas à critiquer le seul chef de la PNH. Il accuse également le Conseil Présidentiel de Transition (CPT) d’avoir échoué dans sa mission de supervision. Selon l’ORDEDH, l’incapacité du CPT à exiger des résultats concrets ou à initier un changement de leadership dans la police révèle un abandon de responsabilité.
L’inaction du CPT face à cet échec est une preuve de déconnexion avec la souffrance réelle de la population », affirme l’ORDEDH.
Face à cette débâcle, l’organisation appelle à la démission immédiate de Normil Rameau, soulignant son incapacité manifeste à assurer la sécurité publique. « Haïti ne peut pas continuer sur cette pente dangereuse. Il est temps de confier la direction de la PNH à une équipe compétente, intègre et visionnaire, capable de restaurer l’espoir et la dignité de la population. »
Alors que certains appellent à envisager des négociations avec les groupes armés pour désamorcer la crise, le président du CPT, Fritz Alphonse Jean, rejette catégoriquement cette idée. Dans une déclaration faite à la Villa d’accueil le 20 juin, il s’est montré intransigeant .
Pour lui, dialoguer avec les gangs reviendrait à légitimer ceux qui ont détruit le tissu social du pays. Il dénonce par ailleurs l’hypocrisie de certains acteurs économiques et politiques, qu’il accuse d’avoir, dans un passé récent, financé ou soutenu indirectement les groupes criminels. « Ceux qui réclament aujourd’hui le dialogue sont les mêmes qui ont mis les armes entre les mains des bandits. »
Un an après le retour de Normil Rameau, le constat est sans appel : le chaos règne, les promesses sont trahies, et les victimes se multiplient. Pendant ce temps, l’État continue de fuir ses responsabilités, la société civile s’interroge, et la majorité silencieuse, prise en otage, attend un sursaut national. Ce sursaut viendra-t-il ? Pour l’instant, le doute persiste.