
Le 23 juin 2025, la musique haïtienne a perdu l’un de ses plus grands architectes sonores : Richard Duroseau, décédé à New York à l’âge de 85 ans. Accordéoniste et pianiste de génie, il fut l’un des pionniers du konpa dirèk, genre qu’il a contribué à façonner avec une élégance et une audace inégalées. Sa disparition marque la fin d’une époque, mais son héritage musical continue de résonner dans chaque note jouée sur les scènes haïtiennes et diasporiques.
Né le 3 novembre 1940 à Port-au-Prince, Richard Duroseau grandit dans une famille profondément enracinée dans la tradition musicale. Entouré de figures comme Lyncée, Mozart et Kreutzer Duroseau, il découvre très tôt le pouvoir expressif des claviers. À seulement treize ans, il entre dans la scène musicale comme un météore, imposant l’accordéon comme un instrument de sensualité et de sophistication dans un konpa encore en gestation.
Son parcours l’amène à collaborer avec les plus grands, notamment au sein de l’Ensemble Nemours Jean-Baptiste, où il devient l’un des fameux “Trois Dangers” du kompa aux côtés de Raymond Gaspard. Son style, à la fois raffiné et populaire, révolutionne la place de l’accordéon dans la musique de danse haïtienne. Il ne jouait pas seulement : il racontait, improvisait, sculptait des émotions à travers ses instruments.
Au fil des décennies, Richard Duroseau s’impose comme un mentor, un arrangeur recherché et un ambassadeur de la culture haïtienne. Il fonde les Duroseau Brothers, joue avec Mini All Stars, Ska-Shah #1, et sillonne les scènes de la Caraïbe, de Brooklyn et de la scène jazz new-yorkaise. Honoré à plusieurs reprises, notamment par “Antilles Mizik” en 1999 et la Fondation Françoise Canez Auguste en 2007, il reste une figure tutélaire pour toute une génération d’artistes.
Même affaibli par l’âge, il ne s’est jamais éloigné de la musique. Jusqu’à ses derniers jours, il répondait aux sollicitations de jeunes musiciens, transmettant son savoir avec humilité et passion. Sa vie fut un chant d’amour à Haïti, un plaidoyer pour la beauté, la mémoire et la transmission.
La Rédaction