La République dominicaine dicte le tempo diplomatique, le Conseil présidentiel reste silencieux

Le Conseil de sécurité des Nations Unies s’est penché le 26 juin 2025 sur la situation en Haïti, à la suite d’une initiative étrangère pilotée par la République dominicaine, appuyée par le groupe A3++. Cette offensive diplomatique, menée sans consultation apparente d’Haïti, a mis en lumière l’absence de coordination entre les partenaires internationaux et les instances de gouvernance haïtiennes, notamment le Conseil présidentiel de transition, dont le mutisme prolongé interroge.

La manœuvre dominicaine, structurée autour d’une lettre signée par le président Luis Abinader et trois anciens chefs d’État, présente un récit unilatéral de la crise haïtienne, axé sur les risques transfrontaliers et l’expansion des gangs armés. Aucun acteur haïtien n’a été associé à la rédaction de ce document, et aucune réponse institutionnelle n’est venue du Conseil présidentiel, ni avant ni après la réunion. Cette passivité affaiblit considérablement la position diplomatique d’Haïti.

Alors que la République dominicaine s’érige en intermédiaire régional, usant de son influence pour relancer la Mission multinationale de soutien à la sécurité (MMAS), les autorités haïtiennes n’ont pas saisi l’opportunité de porter leur voix. Aucun document de cadrage ni de déclaration publique n’a émané du Conseil présidentiel ou de son représentant permanent à l’ONU, malgré les enjeux de souveraineté engagés.

Cette configuration renforce une asymétrie flagrante : d’un côté, des puissances étrangères structurent l’intervention en Haïti en l’absence de contre-proposition ; de l’autre, un organe exécutif haïtien transitoire dont l’inaction prolongée traduit soit un désintérêt, soit une absence de stratégie. Le Conseil présidentiel, bien qu’installé dans une logique de transition, ne peut justifier son immobilisme face à des décisions internationales qui affectent directement le territoire national.

Le silence institutionnalisé du pouvoir haïtien laisse libre cours à des lectures extérieures souvent biaisées, voire opportunistes. Dans cette affaire, la République dominicaine se positionne comme arbitre de la crise haïtienne, sans être contredite ni encadrée. Et pendant ce temps, le Conseil présidentiel semble s’accommoder de ce déséquilibre, compromettant davantage la légitimité de l’État haïtien sur la scène internationale.

La Rédaction