CPT–Secteur privé : un dialogue affiché, des réformes toujours en attente

L’initiative du Conseil présidentiel de transition (CPT) de rencontrer les représentants du secteur privé, le lundi 30 juin 2025, s’inscrit dans une volonté affichée de jeter les bases d’une gouvernance rénovée. La rencontre, encadrée par des discours sur la transparence, l’efficacité et la compétitivité, s’insère dans une rhétorique déjà familière aux Haïtiens : celle de la réforme promise mais rarement concrétisée.

Si l’on s’en tient aux déclarations officielles, un nouveau pacte semble émerger, fondé sur le dialogue entre l’État et les forces économiques pour enclencher un progrès durable.

Mais derrière cette façade consensuelle, la réalité institutionnelle demeure inchangée. Le pays continue d’évoluer dans un climat où la parole politique n’est pas toujours suivie d’effet, et où les grands principes sont brandis comme des symboles plus que comme des outils d’action.

Parler de « gouvernance moderne » dans un État miné par la désinstitutionalisation revient souvent à escamoter les urgences réelles du moment : l’incapacité de l’administration publique à fonctionner, l’érosion du contrat social et la déresponsabilisation des élites.

Le secteur privé, partenaire convoqué à la table du dialogue, est loin d’être un acteur neutre dans cette équation. Historiquement, certains pans de ce secteur ont participé à la reproduction des déséquilibres structurels, voire au maintien d’un cadre économique inégalitaire.

Le CPT, en lui tendant la main sans poser de conditions claires quant aux responsabilités sociales de ses représentants, semble privilégier le court-terme politique au détriment d’une refonte éthique et systémique du modèle économique.

Par ailleurs, l’accent mis sur un environnement des affaires « plus compétitif » révèle une vision du développement souvent déconnectée des réalités vécues par la majorité. Sans justice fiscale, sans protection des petites entreprises, sans inclusion des travailleurs informels, la compétitivité risque de servir les mieux dotés au détriment des plus vulnérables.

Il ne s’agit pas simplement de stimuler les investissements, mais de redistribuer les leviers du développement dans une logique d’équité et de justice sociale.

La Rédaction