Le Barreau de Port-au-Prince dénonce le processus d’élaboration de l’avant-projet de constitution

​Le Barreau de Port-au-Prince a établi une commission pour analyser l’avant-projet de constitution, et son rapport dénonce le processus d’élaboration comme étant illégitime et irrégulier. L’analyse de la commission est guidée par les normes juridiques et la problématique de la légitimité, tout en s’abstenant de se prononcer sur le contenu du texte.

​Le rapport juge que la constitution doit émaner de la volonté de la collectivité nationale, et que le processus doit respecter les droits politiques des citoyens. Il souligne l’adhésion du peuple haïtien à une conception libérale de la démocratie, en particulier avec la constitution de 1987.

​Sur le plan juridique, le rapport constate qu’un acte constituant originaire ne peut intervenir qu’en cas de rupture de l’ordre constitutionnel, ce qui n’a pas eu lieu dans le cas présent. Les autorités actuelles ont d’ailleurs prêté serment de respecter la Constitution de 1987, rendant leur initiative une violation de serment et un acte de haute trahison.

​Le processus est dénoncé comme frauduleux et en contradiction avec les textes de transition, même s’ils sont de nature juridique douteuse. Le rapport précise que la Conférence Nationale n’a jamais eu lieu et que l’avant-projet est l’œuvre du seul Comité de Pilotage, ce qui constitue une imposture.

​Le processus souffre également d’un déficit de légitimité, car ses auteurs ne sont pas des représentants élus du peuple ou des structures représentatives de la société. Le rapport évoque l’histoire constitutionnelle d’Haïti et les principes d’un processus démocratique qui impliquerait un référendum d’opportunité et la mise en place d’une assemblée constituante.

​La commission s’oppose à la manœuvre de révision, similaire à celle menée par le défunt Président Jovenel Moïse en 2021. Elle estime que le contexte sécuritaire ne permet pas une participation citoyenne suffisante à un référendum, ce qui rendrait le résultat douteux et le texte illégitime.

​Le décret référendaire est perçu comme une fuite en avant, car il contraint les citoyens à voter sur le contenu du texte sans remettre en question l’irrégularité du processus. Le rapport craint qu’une minorité finisse par imposer un texte qui, en plus d’être irrégulièrement conçu, manquerait de légitimité démocratique.

Le Barreau constate l’irrégularité et l’illégitimité du processus et s’abstient de se prononcer sur le contenu de l’avant-projet. Elle encourage le respect de la Constitution de 1987 et le rétablissement des institutions compétentes pour une éventuelle révision.

​La commission recommande également, à défaut, que le peuple soit d’abord consulté sur l’opportunité de changer la Constitution. Si le peuple s’y prête, une assemblée constituante serait chargée d’élaborer un nouveau texte à soumettre à l’approbation populaire.

La Rédaction