.

Dix mois après que les flammes de la peur et du désespoir ont englouti le bas de la ville, le Conseil présidentiel de transition (CPT) et le gouvernement haïtien ont tenu, pour la première fois, un Conseil des ministres au Palais national. Un acte symbolique, lourd de sens, dans une capitale encore marquée par la violence, la désolation et la perte de repères.
Pour beaucoup, cette séance au Palais national représente un frisson d’espoir, un retour progressif de l’État dans l’espace sacré de la République. Pour d’autres, c’est un geste tardif, un simulacre de présence étatique après des mois d’inaction. Mais pour certains acteurs de la scène politique, notamment l’ancien ministre Lorthe Duckenson Blema, ce moment rappelle avant tout la mémoire d’un combat politique et humain.
J’avais osé reconstruire la vie, ils avaient choisi le silence. Aujourd’hui, ils imitent ma vision. L’histoire a de la mémoire. »
Lorthe Duckenson Blema, sur X (ancien Twitter)
Ces mots résonnent comme un reproche, mais aussi comme un rappel historique. En effet, au cours de son passage au gouvernement, Blema avait tenté d’initier une politique de proximité, axée sur la reconstruction du centre-ville de Port-au-Prince, la réhabilitation des quartiers abandonnés et la restauration du symbole présidentiel — le Palais national , comme centre du pouvoir légitime.
Mais ses efforts, à l’époque, avaient été étouffés par un climat d’instabilité politique, de calculs personnels et de luttes d’influence. Dix mois plus tard, l’histoire semble lui donner raison.
Le Conseil des ministres tenu ce mercredi au Palais national n’est pas seulement une réunion administrative ; c’est un acte de souveraineté. C’est une réappropriation de l’espace républicain, un défi lancé à la peur et aux gangs qui, depuis des années, dictent leur loi dans le cœur de la capitale.
Cependant, comme le souligne Blema, la symbolique ne suffit pas. Reconstruire la vie, ce n’est pas seulement siéger dans les murs du Palais, mais redonner confiance au peuple, offrir des perspectives et des actions concrètes : éducation, sécurité, travail, dignité.
Haïti traverse l’un des tournants les plus critiques de son histoire contemporaine. Entre mémoire et oubli, courage et hypocrisie, la ligne est fine.
Si certains imitent aujourd’hui une vision qu’ils avaient jadis méprisée, c’est peut-être parce que la réalité les y contraint. Mais l’histoire, elle, se souvient toujours de ceux qui ont osé avant les autres.
Laisser un commentaire