L’érection d’une statue de Richie au Cap-Haïtien : une violation flagrante de la constitution haïtienne

L’installation récente d’une statue à l’effigie de Jean Herard Richard, alias Richie, musicien et producteur emblématique du groupe Klass, sur une place publique du Cap-Haïtien, a provoqué une controverse majeure. Bien que célébrer une icône de la culture haïtienne puisse sembler légitime, cet acte révèle des failles profondes dans le respect de l’État de droit en Haïti et met en lumière les dérives d’une société en quête de repères.

Il s’agit ni plus ni moins, sans aucune autre forme de procès, d’une violation de la Constitution haïtienne de 1987. La loi-mère du pays est claire : aucune statue ou monument ne doit être érigé en l’honneur d’une personne vivante.

Cette disposition, loin d’être une simple formalité, vise à éviter le culte de la personnalité et à garantir une neutralité historique. Pourtant, l’érection de cette statue, soutenue par la mairie du Cap-Haïtien, bafoue ouvertement cette règle fondamentale.

Ce geste ne peut être réduit à une simple maladresse administrative. Il illustre un mépris flagrant pour les lois qui devraient structurer la société. Lorsque des institutions publiques, censées être les gardiennes de la légalité, se permettent de contourner la Constitution, elles contribuent à l’érosion de la légitimité de l’État et fragilisent les fondations mêmes de la République.

Cette transgression s’inscrit dans un contexte plus large d’incohérences dans l’application des lois en Haïti. À titre d’exemple, une école avait été empêchée de porter le nom de l’écrivain Dany Laferrière, sous prétexte de respecter cette même disposition constitutionnelle. Pourquoi alors la règle est-elle ignorée dans le cas de Richie ? Cette disparité dans l’application des lois reflète une société où l’arbitraire prime sur la justice et où l’émotion populaire supplante la raison juridique.

Il est crucial de souligner que les contributions artistiques de Richie au compas haïtien sont indéniables et méritent d’être reconnues. Cependant, cette reconnaissance ne saurait s’opérer au détriment des principes constitutionnels. Le respect des lois est une condition sine qua non pour bâtir une société équitable et durable.

Des implications au-delà de l’acte

En permettant de telles violations, le message envoyé est dévastateur : les lois haïtiennes sont malléables et peuvent être manipulées au gré des émotions et des pressions sociales. Cette normalisation de l’illégalité affaiblit les institutions et donne une image d’un État incapable d’assurer la cohérence de son propre cadre juridique.

Quelles seront les prochaines dérives si cet acte reste impuni ? Quelle crédibilité Haïti peut-elle espérer auprès de la communauté internationale si elle ne respecte pas ses propres lois ?

Un appel à la responsabilité des autorités

Il est impératif que les autorités compétentes, notamment le Conseil Présidentiel de Transition (CPT), interviennent pour rectifier cette situation. Le silence ou l’inaction face à une telle transgression constituerait un précédent dangereux, légitimant d’autres violations similaires.

En tant que figure emblématique, Richie aurait probablement préféré que son héritage soit célébré dans un cadre légal et respectueux des normes constitutionnelles. L’acte de l’honorer par une statue, bien que porteur d’une noble intention, risque de ternir cette reconnaissance en raison de son caractère illégal.

La Constitution est plus qu’un simple texte ; elle incarne les aspirations d’un peuple à vivre dans une société juste et organisée. En la respectant, nous honorons les luttes historiques pour la démocratie et l’équité. En la violant, nous trahissons ces idéaux et compromettons notre avenir collectif.

L’érection de la statue de Richie, bien qu’animée par un désir de célébration, est une erreur symbolique et juridique. Elle met en lumière les défis auxquels Haïti est confrontée : le manque de respect des lois, l’absence de cohérence institutionnelle et la faiblesse des autorités. Il est temps de tirer les leçons de cette affaire et de réaffirmer l’importance de la légalité dans la construction d’un État moderne et respecté.

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