Haïti poursuit son cycle infernal. Rien ne va dans la République. À part des promesses en veux-tu, en voilà, l’exécutif semble être dépassé par les évènements. Ayant pour mission de doter le pays d’autorités légitimement élues, le CPT et le gouvernement ont franchi une étape importante quant à l’installation d’un Conseil Électoral Provisoire qui est cependant amputé de 2 membres. Outre cette anomalie, le CEP est frappé de plein fouet d’inconstitutionnalité. Ainsi, il y a lieu de se questionner sur la légalité de cette instance constitutionnelle dont plusieurs membres pourraient ne pas jouir de la nationalité haïtienne et ne disposeraient d’aucun droit civil et politique.
La fin justifie les moyens, dit-on. En politique, cet adage est d’autant plus vrai en Haïti. Dans un élan de doter le pays d’un CEP coûte que coûte, l’exécutif a passé outre des prérogatives constitutionnelles et autorisé entre soupçons et illégitimité, l’installation d’un CEP, en vue du lancement de la machine électorale.
La constitution prévoit un Conseil Électoral Permanent de 9 membres
Tout d’abord, la question de conseil électoral provisoire est en violation flagrante de la loi-mère du pays. Nulle part est-il mentionné dans la constitution, la pérennisation du conseil électoral provisoire.
L’article 191 consacré à la section du CEP précise que le Conseil Electoral Permanent (non provisoire) est chargé d’organiser et de contrôler en toute indépendance, toutes les opérations électorales sur tout le territoire de la République jusqu’à la proclamation des résultats du scrutin.
De surcroît, le CEP doit disposer de 9 membres pour entrer en fonction alors que ce Conseil Électoral Provisoire est composé de 7 membres. Ils ont prêté serment et institué leur bureau alors que la constitution a prévu un CEP à 9 membres.
Des conseillers électoraux dépourvus de la nationalité haïtienne
Des doutes planes sur plusieurs membres du conseil électoral restreint quant à l’effectivité de leur nationalité haïtienne. 4 membres du CEP fraîchement installés, ne peuvent aucunement attester leur appartenance à la nation haitienne.
Ils ne disposent d’aucune pièce d’identité valide, et il a fallu la confirmation verbale de 2 témoins pour confirmer l’identité de ces personnalités qui sont désormais des hauts fonctionnaires de l’État, malgré ces vices de droit et contraintes légales. L’article 16 de la constitution en vigueur a pourtant été très clair quant à la jouissance des droits civils et politiques de tout citoyen haïtien. Mais comment jouir pleinement de ces droits alors qu’on ne peut confirmer sa citoyenneté ?
Un CEP illégal, béni par l’exécutif
Toujours dans ce même esprit de violations flagrantes de la constitution, le Conseil Présidentiel de Transition qui fait office du président de la République, a procédé à la nomination et assisté à l’installation des conseillers électoraux sans se préoccuper du fond et de la forme du processus, en contradiction à l’article 136 de la constitution amendée.
Pourtant, pour agir en justice n’est-il pas nécessaire d’avoir le droit, l’intérêt, la qualité et la capacité. En quelle qualité, un non citoyen haïtien siège au CEP ? Pour défendre quel intérêt?
La cour de Cassation, la plus haute instance judiciaire du pays, garant de l’État de droit et du respect strict de la constitution, a donné elle-même le coup fatal. Le président de la Cour a dirigé justement la prestation de serment et est le principal témoin des irrégularités liées aux personnalités devant composer le CEP.
Sans pièce d’identité, dépourvu de nationalité, ce n’est pas grave pour le président de la cour suprême du pays, la prestation serment devait avoir lieu, contre vents et marées.
Et pourtant, l’article 193 alinéa 3 de la constitution en vigueur stipule que pour être membre du Conseil Electoral Permanent, il faut: jouir de ses droits civils et politiques et n’avoir jamais été condamné à une peine afflictive et infamante.
Tout compte fait, le CEP a été installé et a pour objectif d’initier un référendum constitutionnel et organiser des élections générales dans le pays, pour un retour à l’ordre démocratique et constitutionnel. Mais dès le départ, le processus est entaché d’illégalité. À quelles élections peut-on vraiment s’attendre d’un CEP dont la formation bafoue et viole les prescrits sacrés d’une constitution en vigueur.